Comment protéger un réseau de haies sur sa commune ?

Dominique Dupain, 2008

Il y a une dizaine d’années, la commune de Saints en Puisaye a mené une réflexion globale et innovante pour préserver son réseau de haies et a décidé d’intégrer des mesures de protection des haies dans le POS. Les résultats sont particulièrement encourageants puisqu’aucun arrachage de haies n’a été constaté depuis cette modification du POS. La démarche globale, nécessaire à l’appropriation de tous les habitants, est primordiale à la réussite d’un projet de protection d’un réseau de haies. C’est cette expérience que nous présentons dans le premier chapitre.


Depuis, les différents rôles de la haie, dans la préservation de l’environnement (eau, sol, biodiversité), ont été reconnus ; la législation a donc évolué pour protéger les haies. Ces nouvelles mesures sont tout à fait appropriées pour protéger efficacement les réseaux de haies, nous les présentons dans le deuxième chapitre.

L’exemple de la commune de Saints

Cette partie a été réalisée sur la base de :

  • l’interview de Monsieur Jean Massé, Maire de Saints en Puisaye et Conseiller Général (Canton St Sauveur en Puisaye).
  • l’étude de P. Salaün « La participation des acteurs socio-économiques à un projet de conservation du bocage à Saints en Puisaye, 1998 »
  • le POS de la commune de Saints en Puisaye

    1. Contexte

La disparition du maillage bocager est flagrante si on compare les photos aériennes de la commune entre 1949 et 1993:


Le linéaire de haies est estimé en 1949 à plus de 500 km alors qu’il est évalué à 131 km en 1993, soit environ 75% des haies qui ont été arrachées. Le paysage avait fortement changé et pour beaucoup de gens ce n’était pas dans un sens positif, les chasseurs par exemple avaient observé une baisse massive de biodiversité. Il fallait vraiment réagir pour enrayer le phénomène.

2. Démarche

21. L’implication nécessaire des différents acteurs au projet

Pour mener à bien le projet, la Commune a développé une démarche globale de mobilisation et d’implication de la population :

  • information de la population, via le bulletin municipal, pour annoncer le démarrage du projet de conservation du bocage communal,
  • sensibilisation de la population à travers une exposition « Les bouchures et nous. Etat des lieux du bocage poyaudin ». Véritable action de vulgarisation, ce rendez vous a également permis la constitution d’un Comité d’action porteur du projet,
  • visites de projets dans d’autres communes : plantation de haies le long de chemins communaux, remembrement cynégétique et paysager…
  • enquête sur le projet de réhabilitation des haies qui a montré que 86% des enquêtés (60% dans le groupe des agriculteurs) étaient favorables au projet. Ce qui a fortement motivé le Comité d’action à s’engager dans un programme d’action visant à la modification du POS communal.

La commune de Saints a mis en place un POS en 1977, pendant 25 ans Saints était la seule commune de Puisaye à avoir un POS.

Le Conseil Municipal de l’époque était constitué de 50% d’agriculteurs en activité ou retraités, au départ tout le monde n’était pas d’accord pour introduire des mesures de protection des haies mais après les différentes phases de sensibilisation, les modifications du POS ont été votées à l’unanimité. Lors de l’enquête d’utilité publique, aucune opposition n’a été inscrite. Le POS modifié a été approuvé en 2002, ce document est consultable à la mairie de Saints en Puisaye.

22. La protection des espaces naturels dans le POS ou le PLU

Le rapport de présentation doit analyser, en fonction de la sensibilité du milieu, l’état initial du site et de l’environnement et les incidences de la mise en œuvre du POS/PLU sur leur évolution ainsi que les mesures prises pour leur préservation et leur mise en valeur.

Le zonage du POS/PLU doit donc respecter le caractère de la zone et prendre en considération les différentes contraintes environnementales. Les zones ND du POS et N du PLU, « comprennent les zones à protéger en raison d’une part de l’existence de risques ou de nuisances, d’autre part, de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique » article R.123-18 CU ancien.

23. Le coût, le financement et les appuis

Le coût total a été de 150 000 F (22 865 €) qui représentait les dépenses suivantes : architecte, paysagiste, commissaire enquêteur, reproduction de plans.

Une subvention de 87 850 F (13 391 €) de la Direction Générale de Décentralisation et de la Dotation Spéciale Urbanisme a été obtenue.

Le Conseil Municipal a consulté la DDE, DDAF, DDASS, DRIRE, et les Chambres Consulaires.

3. Quels résultats 8 ans plus tard ?

Il y a bien eu quelques réfractaires mais c’était vraiment marginal, il n’y a plus d’arrachage massif, il a été observé quelques arrachages de reliques de haies. Les agriculteurs sont maintenant une population minoritaire dans les communes, ils doivent faire attention à l’environnement de tous afin d’éviter les conflits.

La commune a replanté 1 km de haies, Mr J. Massé, le maire actuel, 2 km, grâce au Projet bocage de la Région (voir CD-Rom 1ère partie).

La commune n’entretient les haies que tous les deux ans, ce qui a comme avantage de laisser le temps aux arbres de cicatriser, aux oiseaux de nidifier et à la commune de faire des économies. Les entretiens des haies par la DDE ne sont pas appropriés, il conviendrait d’envisager une modification des pratiques avec ces services départementaux.

Et si c’était à refaire… « On referait de la même façon ! »

4. Les autres mesures de protection

Partie tirée du Code Rural

41. La protection des formations linéaires boisées

  • Article L126-3
     

    Le préfet peut prononcer la protection de boisements linéaires, haies et plantations d’alignement, existants ou à créer, soit lorsque les emprises foncières correspondantes ont été identifiées en application du 6° de l’article L. 123-8 du présent code (voir ci-dessous), soit lorsque le propriétaire en fait la demande. Dans ce dernier cas, lorsque ces boisements, haies et plantations séparent ou morcellent des parcelles attenantes données à bail, la demande est présentée conjointement par le bailleur et le preneur.

    Ces boisements, haies et plantations sont identifiés par un plan et un descriptif de leur situation dans les parcelles cadastrales.

    Dans les zones ou périmètres où des plantations et semis d’essences forestières ou la reconstitution après coupe rase sont interdits ou réglementés, en application de l’article L. 126-1, le préfet peut imposer aux propriétaires de terrains qui ne font pas l’objet d’une occupation agricole ou pastorale et dont l’enfrichement ou le boisement spontané risque de porter atteinte à la sécurité de constructions ou de voiries ouvertes à la circulation publique, au maintien de fonds agricoles voisins ou à la préservation de milieux naturels ou paysages remarquables de procéder à leur débroussaillement et de les maintenir en état débroussaillé.

    Lorsque le propriétaire ne procède pas à ce débroussaillement, celui-ci peut être exécuté par les collectivités territoriales et dans les conditions mentionnées à l’article L. 151-36.

    Les boisements linéaires, haies et plantations d’alignement protégés en application du présent article bénéficient des aides publiques et des exonérations fiscales attachées aux bois, forêts et terrains à boiser. Ils peuvent donner lieu à la passation d’un contrat d’entretien avec le propriétaire ou le preneur.

    A la demande du propriétaire, le préfet peut également, sur avis de la commission départementale d’aménagement foncier, prononcer la protection de vergers de hautes tiges.

    Article L126-4

    Le fait de détruire sans autorisation des boisements, haies et plantations d’alignement mentionnés à l’article L. 126-3 est puni d’une amende de 3750 euros.

    Cette infraction est constatée dans les conditions prévues à l’article L. 121-22.

    42. Les chemins d’exploitation et les travaux connexes d’amélioration foncière

    Article L123-8

    La commission communale d’aménagement foncier a qualité pour décider à l’occasion des opérations et dans leur périmètre :

    1° L’établissement de tous chemins d’exploitation nécessaires pour desservir les parcelles ;

    2° L’exécution de travaux tels que l’arrachage de haies, l’arasement de talus, le comblement de fossés, lorsque ces travaux présentent un caractère d’intérêt collectif pour l’exploitation du nouvel aménagement parcellaire ;

    3° Tous travaux d’amélioration foncière connexes à l’aménagement foncier agricole et forestier, tels que ceux qui sont nécessaires à la sauvegarde des équilibres naturels ou qui ont pour objet, notamment, la protection des sols, l’écoulement des eaux nuisibles, la retenue et la distribution des eaux utiles ;

    4° Les travaux de rectification, de régularisation et de curage de cours d’eau non domaniaux, soit lorsque ces travaux sont indispensables à l’établissement d’un lotissement rationnel, soit lorsqu’ils sont utiles au bon écoulement des eaux nuisibles, en raison de l’exécution de travaux mentionnés au 3° ;

    5° L’exécution de tous travaux et la réalisation de tous ouvrages nécessaires à la protection des forêts ;

    6° L’exécution de travaux de nettoyage, remise en état, création et reconstitution d’éléments présentant un intérêt pour les équilibres naturels et les paysages tels que les haies, plantations d’alignement, talus, fossés et berges. La commission communale identifie les emprises foncières correspondant à ces éléments.

    L’assiette des ouvrages mentionnés aux 1°, 3°, 4° et 5° est prélevée sans indemnité sur la totalité des terres à aménager.

    Article L123-9

    Dès que la commission communale s’est prononcée en application de l’article L. 123-8, il est constitué entre les propriétaires des parcelles à aménager une association foncière, dans les conditions prévues aux articles L. 133-1 à L.1336.

    43. Les Espaces boisés classés

    L’article R-123-18 précise que les zones naturelles ou urbaines comprennent s’il ya lieu, les espaces boisés à créer ou à conserver. Lorsqu’ils sont devenus opposables, les POS/PLU peuvent en effet classer comme espaces boisés les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer. Sont concernés les bois de moins de 4 ha, les parcs et jardins clos attenant à une habitation principale d’une superficie inférieure à 10 ha, les arbres seuls, les haies et réseaux de haies.

    44. Les Espaces Naturels Sensibles du département

    Selon l’article L 142-1 du code de l’urbanisme : « Afin de préserver la qualité des sites, des paysages et des milieux naturels et d’assurer la sauvegarde des habitats naturels, le département est compétent pour élaborer et mettre en œuvre une politique de gestion, de protection et d’ouverture au public des espaces naturels sensibles, boisés ou non. »

    A compter de la décision du département de percevoir la taxe départementale des espaces naturels sensibles, le président du conseil général peut, par arrêté pris sur proposition du conseil général, après délibération des communes concernées et en l’absence de POS/PLU opposable, déterminer les bois, forêts et parcs […] dont la préservation est nécessaire et auxquels est applicable le régime des espaces boisés classés défini par l’article L 130-1 et les textes pris pour son application.

    Le même arrêté ou un arrêté ultérieur pris dans les mêmes formes peut édicter les mesures nécessaires à la protection des sites et paysages compris dans une zone de préemption délimitée en application de l’article L 142-3 du code de l’urbanisme.

    45. Le contrat pour le paysage

    Il est signé entre l’Etat et une ou des collectivités locales, qui s’engagent sur la mise en œuvre d’un programme d’actions et d’opérations à court et moyen termes en faveur du paysage. L’Etat s’engage à financer telle ou telle opération du programme comme la restauration d’un paysage dégradé, enfouissement des réseaux aériens…

Cet article a été publié dans 22. Puisaye. Ajoutez ce permalien à vos favoris.

Un commentaire pour Comment protéger un réseau de haies sur sa commune ?

  1. Buffeteau dit :

    Quand est il de ces haies PRIVEE,qui borde nos routes et nos chemins creux,typique de Puisaye ,qui protège notre faune et notre flore et qui sont, arrachées,coupée,dévasté,sans que personne ne dise ou ne fasse quoi que se soit du fait que cela soit sur des terrains PRIVEE, dans les champs ou au bord des champs.
    C’est une catastrophe pour nos oiseaux de nuit et de jour,c’est une catastrophe pour notre si beau et si typique paysage de Puisaye.Ces haies stabilise les sols, absorbe l’eau, coupe les vents et délimite nos chemins et routes « touristique »????
    Que faire pour arreté ce massacre.
    A l’aide,au secours, et pitié ,pour la Puisaye et la Forterre.

Laisser un commentaire